Le moine poursuivait son prêche et la foule des condamnés à mort l'écoutait en silence; ma femme était morte, et mon fils et mes petitsenfants; tous mes compagnons étaient morts. Moi je vivais et je n'avais plus de semblable. Le passé était tombé de moi; plus rien ne m'enchaînait : ni souvenir, ni amour, ni devoir; j'étais sans loi, j'étais mon maître et je pouvais disposer a mon gré des pauvres vies humaines, toutes voueés à la mort. Sous le ciel sans visage, je me dressais vivant et libre, à jamais seule.
—Simone de Beauvouir: Tous les hommes sont mortels